Tour de Savoie Cyclo
Les rêves d’une tortue qui se voulait lièvre
C’est une longue et lente histoire qui a commencé le 1er février, à la lecture du fil info de https://cyclotourisme-mag.com (saine, mais trop rare lecture). Mon enthousiasme est monté en flèche aux mots Savoie, dénivelé et Juin. Un bon alignement des planètes sur un secteur qui me fait l’effet d’être un papillon de nuit pris dans le faisceau d’un lampadaire. Quelques échanges plus loin avec Olivier, l’organisateur, et je vois l’horizon s’éclaircir avec la double proposition : 16500 mètres de dénivelé en 100 heures (formule Randonneur) ou sans limite (formule Touriste). Une fois inscrit, je dispose de 4 mois pour tergiverser sur la meilleure approche, m’effrayer du pari impossible, et tout préparer dans une pratique dont j’ignorais le B.A.BA Je ne sais si c’est d’habiter dans le plat pays, en Picardie, ou mes quelques années d’escalade dans mes jeunes années (pas uniquement à Fontainebleau 😉 mais je suis humble et respectueux, voire admiratif, pour la montagne. Au final, je serai au départ avec l’ambition de faire la grande boucle en une semaine chrono (168 heures), avec des étapes calibrées au cordeau sur la base de 2500 mD+ par journée. Les hébergements sont réservés, le vélo est adapté avec la panoplie complète du parfait cyclotouriste (garde-boue, sacoches, éclairages, transmission « montagne »). Dans une frénésie d’hyper-contrôle, chaque détail aura été hyper-sécurisé (éclairages en triple, 2 gilets/harnais haute-visibilité, pléthore de vêtements, sans oublier cintres et pinces à linge !), pesé 10 fois, enlevé/ajouté 5 fois (4 mois, cela laisse du temps pour tout remettre en cause en l’absence d’expérience). La messe est dite, ce sera 9 kg d’équipement à trimballer. Pour ce qui concerne la bagagerie, j’avais été déçu par les sacoches « bike-packing » car peu stable et de faible capacité sur mon cadre carbone de taille S. Changer de vélo n’était pas une option, il me restait donc à trouver LA SOLUTION de portage. Ce sera un montage hybride avec un axe traversant arrière de chez https://tailfin.cc, aménagé pour accueillir un porte-bagages (entretoise avec une roue Playmobil !) et des sacoches étanches Ortlieb (2 sacoches de 12,5 litres à l’arrière, 1 à l’avant de 11 litres). Quelques ajustements à la Dremel et le tour est joué. La technique, c’est bien, mais quid de l’humain ? Rien de bien mystérieux : aligner les kilomètres à la faveur de l’hiver, allonger les distances puis incorporer du dénivelé dès que possible. Une semaine au Ventoux mi-mai (séjour ASPTT Carpentras, à Vaison la Romaine) pour parfaire la préparation. Au jour J, je suis plutôt confiant sur le rythme prévu (2500 mD+/jour). Mais alors, pourquoi un rythme de tortue ? – C’est la génétique combinée aux années accumulées : rien que de la mécanique. Ce sera donc 600 mD+/heure en montée lorsque tout va bien ! – Cela pourrait donc faire 60000 mD+ ( !) dans les 100 heures ? – J’avais oublié de mentionner que je ne suis ni compétiteur, ni noctambule, et encore moins un dur au mal. Donc mon petit confort (et mon organisme) m’interdisent plus de 7 heures de vélo par jour sur plusieurs jours d’affilé. C’est peu pour vous, mais beaucoup pour moi 😉 Ca y est, c’est le grand jour ! Mardi 16h : accueil chaleureux par les cyclotouristes chambériens et les nombreux bénévoles heureux de nous recevoir et de participer à l’évènement. Les candidat(e)s et leur vélos sont divers : jeunes ou vieux, high-tech ou vintage, mais surtout beaux (à vélo, tout est plus beau !). Le bonheur de parcourir les routes des Alpes, avec des noms et des paysages aussi célèbres que magnifiques, est unique et intense, mais je n’aurai pas de mots assez forts et évocateurs pour vous le conter. Prenez votre vélo et allez-y ! La montagne est imprévisible et exigeante, cela fait partie du jeu et du plaisir à condition d’y être attentif et respectueux. Ayant roulé de jour à l’exception de la première étape jusqu’à La Chambre (la bien nommée), rien d’anormal malgré du froid, de la pluie et du brouillard sur une bonne partie de la randonnée. Le soleil a fait quelques apparitions bienvenues. Les chiens et moi n’avons jamais eu d’atomes crochus, ce qui devait arriver est arrivé : aux abords du hameau de La Thuile (évidemment), un patou vindicatif sur une route isolée en montée et me voilà à faire demi-tour pour un détour (raccourci) par la vallée. C’est peu glorieux mais efficace ! J’hésite à vous faire la liste des pépites de cette aventure unique, mais elles auront grignoté mon énergie à petit feu, jusqu’à l’usure par manque de repos programmé. En y ajoutant une alimentation erratique qui n’avait fait l’objet d’aucune réflexion/préparation de ma part, et me voilà à remettre en cause mon programme le samedi après-midi. La matinée cloitrée sous la tente (camping à Beaufort) à cause de fortes averses a cassé le rythme et l’envie. Les heures en solo, sans quidam pour parler de la pluie et du beau temps, m’ont paru bien longues. Décision est prise de quitter le parcours à Ugine pour un retour en douceur au point de départ (Challes les Eaux). Passage par Albertville pour retrouver l’ambiance familière de la plaine, en route pour mon dernier hébergement à Frontenex (où je suis merveilleusement bien accueilli). Nuit reposante et redémarrage en douceur, je regagne Challes par la piste cyclable avec ses cyclistes du dimanche matin, loquaces et curieux, pour y retrouver Olivier et Nathalie qui me font l’honneur de m’accueillir et d’échanger sur cette première édition du Tour de Savoie Cyclo. Une conclusion ? Non, ce n’était pas de l’ultra distance, tout juste un voyage itinérant solo en autonomie relative (hébergement en gite/camping). C’était une première pour les organisateurs, mais aussi pour mon vélo qui n’avait jamais porté autant, ni grimpé aussi raide. Une première où rien n’a été laissé au hasard, mais qui aurait mérité un peu plus de souplesse de ma part dans l’organisation des étapes. Une première avec une réussite partielle (j’ai respecté l’objectif de 100 heures, pas ceux de la distance ni du dénivelé), ou tout le mérite revient aux organisateurs, aux personnes qui m’ont reçu et accueilli aux étapes, et aux autres participants qui m’ont inspiré et dont j’ai rêvé être l’égal durant quelques heures ! Il me reste tant à découvrir de la Savoie, et des savoyards, que la prochaine édition fera surement partie de mon programme. Autrement, différemment, mais pas plus rapide 😉 Que la montagne est belle ! Vive la Savoie.
Didier
NDLR
Tout est dit, il n’y a rien à ajouter ci ce n’est des cartes et des images vertigineuses…